Le 5 novembre 1757, Frédéric II de Hohenzollern vainc les Français et les Autrichiens à Rossbach, en Saxe. La manière dont le roi de Prusse retourne en sa faveur une situation désespérée lui vaudra d'être appelé Frédéric le Grand.
L'Europe sur le pied de guerreL'année précédente a débuté la guerre de Sept Ans. D'aucuns la considèrent comme la première guerre mondiale car elle s'est déroulée sur tous les continents.
Frédéric II a conclu avec le roi d'Angleterre George II, également Prince-Électeur du Hanovre, un traité de «neutralité». Du coup, l'impératrice Marie-Thérèse et le roi de France Louis XV ont enterré officiellement une rivalité de 250 ans et négocié un «renversement des alliances». Ils se sont alliés à la tsarine Élisabeth, fille de Pierre le Grand, ainsi qu'à la Suède, la Saxe et l'Espagne.
Débuts difficiles pour la PrusseDans un premier temps, l'armée anglaise du duc de Cumberland est défaite par le duc de Richelieu.
Le roi de Prusse ne peut plus compter que sur lui-même. Il remporte deux premières batailles sur les Impériaux, les troupes de Marie-Thérèse, à Lobositz et Prague. Mais le sort des armes se retourne et il perd successivement les batailles de Kolin, contre les Autrichiens (18 juin 1757) et Gross Jägersdorf, contre les Russes (30 août 1757).
Là-dessus, il apprend qu'une armée austro-française est entrée en Saxe. Elle compte 42.000 hommes sous le commandement du maréchal Charles de Soubise et du feld-maréchal Joseph Friedrich von Sachsen-Hildburghausen. Lui-même n'a que 22.000 hommes à leur opposer.
Le retournement : RossbachLe roi, risquant le tout pour le tout, se met à la tête de son armée et va au devant de l'adversaire. Le 4 novembre, il campe à Rossbach, à 35 kilomètres au sud-ouest de Leipzig.
Le lendemain, les alliés franco-autrichiens cherchent à contourner le camp prussien. En dépit de sa supériorité numérique, le maréchal de Soubise n'est pas pressé d'en découdre, au contraire de son homologue autrichien. Il maintient son armée en formation de marche sans rien voir de la position prussienne dont il est séparé par une colline.
Le roi comprend rapidement l'avantage qu'il peut tirer de cette situation. Comme il a pris la précaution de se déplacer avec un minimum de bagages, il remanie complètement son dispositif en un rien de temps.
Sous le commandement d'un cavalier émérite, le général von Seydlitz, la cavalerie prussienne barre la route à la colonne ennemie. L'infanterie se déploie derrière elle en ordre d'attaque oblique.
La bataille s'engage vers 4 heures de l'après-midi. Soubise n'a plus la possibilité de se déployer. De plus, un corps de cavalerie prussienne tombe sur son flanc droit. Les combats proprement dits durent très peu de temps. Les troupes franco-autrichiennes, surprises, se battent dans le plus grand désordre et ne pensent bientôt plus qu'à prendre la fuite.
Soubise perd 10.000 hommes, blessés, morts ou prisonniers, et toute son artillerie, contre moins de 500 pour Frédéric II. Le maréchal résumera plus tard sa défaite en ces termes : «L'infanterie combattit sans empressement et céda à son inclination pour la retraite».
La postérité d'un vaincuLe maréchal Charles de Soubise, prince de Rohan et duc de Vintadour, devient l'objet de mille moqueries à Paris après sa piteuse défaite de Rossbach.
On compose une chanson à sa gloire :
«Soubise dit, la lanterne à la main,
J'ai beau chercher, où diable est mon armée ?
Elle était là pourtant, hier matin.
Me l'a-t-on prise, ou l'aurais-je égarée ?
Ah! je perds tout, je suis un étourdi.
Que vois-je ciel ! Que mon âme est ravi !
Prodige heureux, la voilà ! La voilà !
Eh ventrebleu ! Qu'est-ce donc que cela ?
Je me trompais, c'est l'armée ennemie.»Cela n'empêchera pas le maréchal de poursuivre une existence de courtisan et de galant homme jusqu'à sa mort, en 1787, à 72 ans, à la veille de la Révolution. Il restera dans la postérité avec une sauce culinaire à son nom !...
La honte de la défaite atteint par ailleurs la favorite de Louis XV, la marquise de Pompadour, à qui Soubise a dû son élévation à la tête de l'armée française, mais celle-ci en mesure mal l'ampleur...
Voyant le roi déconfit à l'annonce de la défaite, la marquise, qui est en train de se faire portraiturer par La Tour, le réconforte en ces termes : «Il ne faut point s'affliger : vous tomberiez malade. Après nous, le déluge !».
Frédéric II ne s'arrête pas làSoulagé, le roi de Prusse ne perd pas de temps et se tourne vers la Silésie que les Autrichiens étaient sur le point de reprendre. Breslau (aujourd'hui Wrozlaw) est déjà tombée entre leurs mains.
Avec les troupes dispersées en Silésie et son armée de Rossbach, le roi reconstitue une force de 35.000 hommes et va au-devant des Autrichiens, au total 65.000 hommes sous le commandement de Charles de Lorraine, beau-frère de Marie-Thérèse. Ce dernier ne doute pas d'en finir rapidement avec «ce corps de garde berlinois qui ose affronter une puissante armée» !
Le 5 décembre 1757, à Leuthen, l'avant-garde de Frédéric attaque de front les positions ennemies tandis que le gros de son armée déborde l'ennemi par son flanc gauche, selon sa tactique de l'attaque oblique. La surprise des Autrichiens est totale et leur retraite se transforme vite en débâcle, livrant la Silésie au roi de Prusse.
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