RUSCA, Jean-Bapstiste-Dominique, baron (La Brigue, 27 novembre 1759 - Soissons, 14 février 1814).
Nous avons encore à déplorer la perte et à honorer la mémoire d’un de nos généraux défenseurs, le baron RUSCA, commandant de la Légion D’honneur, général de division, mort glorieusement, dans le mois dernier, à la tête des troupes qui défendaient la ville de SOISSONS.
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Il naquit à BRIGA, dans le département des Alpes-Maritimes en 1759. Il fit ses premières études dans les Universités de Turin et de Pavie ; puis il étudia la médecine sous les célèbres professeurs Tissot et Franck. Revenu dans son pays natal, il s’attacha au prince de Monaco en qualité de son médecin. Lors de l’entrée des troupes françaises à Nice, il connut le général Biron. Ses liaisons avec les militaires français lui inspirèrent le goût des armes : il obtint du service, et bientôt il se fit connaître de l’armée par son intrépidité, son intelligence et son activité ; aussi son avancement fut-il rapide. En moins de quatre ans il devint général de brigade, grade qui lui fut conféré sur le champ de bataille même, à Vado, dans la rivière de Gênes. Il se couvrit de gloire à la bataille de Lodi ; il combattoit alors sous les yeux d’un héros qui fut toujours le plus grand appréciateur du mérite ; il eut l’honneur d’être choisi par lui pour passer le premier pont de Lodi à la tête de brigade et, il traversa au pas de charge sous un feu terrible et continu de batteries qui tiroient à mitraille.
Quelque temps après, le général Busca fit voir tout ce que peuvent l’art et le talent contre le grand nombre. Avec une poignée de soldats, non seulement il tint tête à un corps considérable d’Austro-Napolitains, mais il le battit complètement à Porto Fermo. Cette victoire sauva l’armée qui auroit pu être coupée si des troupes qui débarquèrent alors à Livourne eussent pu opérer leur jonction avec l’armée ennemie. Le général Rusca fut fait général de division sur le champ de bataille de Porto Fermo.
Dans la retraite de Naples, où il commandoit l’aile droite de l’armée française, il eut à combattre pendant trois jours de suite des forces bien supérieures, et les repoussa constamment : faire de grandes choses avec peu de moyens, voilà les traits par lesquels se manifestent les grands talens.
Gouverneur de l’île d’Elbe à l’époque du couronnement de S.M., il célébra ces évènements mémorables par des actes de bienfaisance ; il réunit à Porto-Ferrajo tous les pauvres de l’île, les fit habiller de neuf et leur donna un repas sur la place publique ; c’est ainsi qu’il faisoit chérir et respecter le gouvernement français en Italie.
Dans la dernière guerre contre l’Autriche, il eut le commandement du Tyrol. Pendant que l’Empereur marchoit sur Vienne, le général Rusca tint en échec plusieurs corps autrichiens, et les empêcha de rejoindre leur armée.
Après cette guerre, d’anciennes et nouvelles blessures, qui n’ont jamais été à demander sa retraite, mais l’Empereur l’estimait trop pour la lui accorder ; il obtint seulement un congé illimité. Il se retira donc à Milan, près de sa fille, mariée à un riche négociant de cette capitale ; là il couloit des jours heureux, et tranquilles. Lorsqu’il apprit le malheur de nos armées. Toute l’Europe étoit liguée contre l’Empereur : déjà l’Italie et la
France étoient menacées : d’un côté on se battoit sur les bords de l’Adige : de l’autre, l’ennemi se préparoit à passer le Rhin. Le général Rusca sortit de sa retraite, indigné du repos dans lequel il vivoit.
« Je n’ai point reçu – dit-il - les bienfaits de l’Empereur pour vivre en sujet inutile. »
Malgré son âge et ses infirmités, il part, arrive à Lyon, et dépose dans le sein de son frère ses derniers sentiments. « Nous nous voyons peut-être pour la dernière fois, lui dit-il ; mais je sacrifie volontiers ma vie pour la France et pour le GRAND NAPOLÉON. Que j’ai toujours aimé et admiré.
Chargé par S.M. du commandement de Soissons, il avoit pris toutes ses mesures pour la défendre : déjà il opposoit une vigoureuse résistance à l’ennemi, lorsqu’en visitant les postes il est frappé d’un boulet de canon ; coup fatal, qui abat le courage des Soissonais et décide u sort de leur ville. Il n’a vécu qu’une heure après sa blessure.
Le général Rusca étoit bon, affable, même populaire avec ses soldats ; il les regardoit comme ses enfants, et en étoit chéri comme un père ; sa bourse leur était ouverte dans leurs besoins. Il alloit à cette bonté une sévérité dans le maintien de la discipline, écoutant les plaintes qui lui étoient portées, et réprimant les excès qui lui étoient dénoncés. Sa loyauté, sa justice, son humanité lui avoient concilié l’affection des citoyens, autant que celle des troupes.
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